Jean-Yves Rochex, « Entre école et famille : interdépendance et inter-signification », Dialogue, n°127, janvier 2008, p. 20-23.
Jean-Yves Rochex, « Entre école et famille : interdépendance et inter-signification », Dialogue, n°127, janvier 2008, p. 20-23.
1°) que le jeune s’autorise à devenir autre que ses parents,
2°) que ses parents l’autorisent en retour, symboliquement, à ce qu’il ne soit pas tenu de reproduire leur histoire,
3°) que le jeune reconnaisse la légitimité de l’histoire et des pratiques de ses parents dont il veut s’émanciper. [...] Pouvant faire valoir ce qu’ils ont été et l’histoire dont ils sont issus dans ce qu’ils deviennent à et par l’école, les adolescents sont à même de pouvoir conjuguer permanence et changement entre passé et avenir, entre histoire familiale et histoire scolaire, entre identifications et idéaux. Dès lors leur expérience scolaire peut être expérience de développement symbolique et social et non exigence ou injonction de changement radical. "
Avec la scolarisation, l’école transforme le rapport au monde de l’enfant, ou plus exactement le rapport à son monde (familial), le plongeant alors dans un entre-deux souvent douloureux.
« Ne pas m’exclure – ou ne pas être exclu – du système scolaire m’imposait de m’exclure de ma propre famille, de mon propre univers. Tenir les deux sphères ensemble, appartenir sans heurts à ces deux mondes n’était guère possible. Pendant plusieurs années, il me fallut passer d’un registre à l’autre, d’un univers à l’autre, mais cet écartèlement entre les deux personnes que j’étais, entre les deux rôles que je devais jouer, entre les deux identités, sociales, de moins en moins compatibles entre elles, produisait en moi une tension bien difficile à supporter et, en tout cas, fort déstabilisante. »
Didier Eribon, Retour à Reims, Paris, éditions Flammarion, 2010.
Pour éviter à l’enfant cette position intenable entre sa famille et l’école, il convient de créer les conditions d’une coopération avec ses parents. Car c’est avec leur autorisation que ce dernier pourra, au fil de sa scolarité, véritablement grandir, s’épanouir et devenir, à l’abri des conflits de loyauté, une personne singulière.